" Deux ou trois choses vues d'Amérique "

"Happy Birthday Mr President"

C'est la célèbre chanson de Marilyn souhaitant bon anniversaire à JFK, mais c'est le leitmotiv de la presse du jour. Barack Obama a fêté ses 49 ans et tandis qu’on apprenait qu’il allait célébrer son anniversaire tout seul, médias et Démocrates multipliaient les reportages et les initiatives pour marquer, à leur façon, l’anniversaire du Président.

Au petit matin, on connaissait déjà tous les détails de cette journée très spéciale pour BO : petite journée de travail à Washington, déjeuner avec les membres du Sénat, puis Air Force One direction Chicago, pour un dîner entre amis dans "sa" ville. Cet après-midi, les journalistes nous expliquaient que Michelle et Sasha étaient parties en vacances à Marbella, Malia en camp de vacances pour un mois, mais n’oubliaient pas de nous rassurer sur le fait que "le président avait reçu deux appels, le premier de la Première Dame et de Sasha (…) et le second de Malia, qui (- précision importante :) n’avait le droit qu’à un coup de fil durant toute la durée de son séjour et l’a utilisé pour appeler son père et lui souhaiter un bon anniversaire."

Les Démocrates, eux aussi, se sont organisés pour relayer l’événement à travers tout le pays. Depuis une semaine déjà, le DNC avait ressorti les listes de soutien de campagne pour envoyer à tous les inscrits une série de mails les invitant à signer, avec eux, une carte d’anniversaire – en ligne – et rappeler, au passage, que le parti avait besoin de nouveaux dons pour gagner les campagnes de novembre. Les élections de mi-mandat approchant, BO a d’ailleurs lui-même été mis à contribution et dès demain, il enchaînera trois meetings de campagne, réservés aux généreux donateurs. En effet, le Parti Démocrate, qui connaît des difficultés pour mobiliser ses votants – et des fonds - , a décidé de ‘rentabiliser’ le retour d’Obama à Chicago. Pour aider le candidat briguant l’ancien siège de BO, Alexi Giannoulias, un déjeuner de soutien a été organisé, ou plutôt ‘vendu’ à $2.400 le ticket d’entrée (par personne bien sûr et rajoutez $5.000 si vous voulez vraiment rester déjeuner et ne pas être gentiment congédié après les petits fours et le toast de BO ! Bref, un déjeuner dont les recettes sont estimées à $1 million tout de même. Mais ce n’est qu’une mise en bouche puisque BO doit se rendre ensuite à un second meeting, cette fois-ci au profit du Parti démocrate, avant de finir sa journée autour d’un dîner très privé, réservé aux très très généreux donateurs du DNC dont le billet d’invitation cette fois a été vendu à $30.400 par personne !

Qu’on se le dise : l’anniversaire du Président est donc une journée très spéciale aux Etats-Unis. Car finalement, des habitants de Chicago venus attendre l’arrivée de Barack Obama à l’aéroport avec des petites pancartes "Happy Birthday Mr. Président" aux élus Républicains qui, eux, ont profité de l’occasion pour rappeler à leurs électeurs le scandale éthico-financier lié à l’affaire Blagojevitch (rappelez-vous, il avait  tenté de vendre la succession du siège de BO au candidat le plus offrant en 2008 et le verdict doit être rendu cette semaine), tous les Américains étaient invités à célébrer les 49 ans de leur Président aux cheveux de plus en plus grisonnants.

Mariage royal en démocratie

Ce fut le sujet qui a passionné la presse américaine et le public avide de détails.

Depuis des semaines déjà, il y avait ceux qui avaient pris les paris sur le couturier choisi par Chelsea Clinton pour sa robe de mariée ; ceux qui spéculaient sur le lieu de la cérémonie et ceux qui attendaient un des 400 cartons d’invitation pour le mariage le plus envié de l’année. Et puis ce week-end, il y a eu les médias, arrivés dès le début de la semaine pour tenter de surprendre les premiers invités ou les dernières préparations, et puis les badauds et les curieux, convoyant par centaines vers Rhinebeck dans l’espoir d’apercevoir les futurs mariés. Espoirs déçus, on n'a rien vu hormis quelques photos.

Chelsea Clinton et Marc Mezvinski se sont donc unis samedi à Rhinebeck, une petite ville au nord de New York. Et si, jusqu’au dernier moment, les familles et l’entourage avaient tout fait pour protéger le secret de cette union, les moindres détails de ce mariage extraordinaire se sont trouvés étalés à la une de tous les médias dès samedi soir : la très select liste des 400 invités bien sûr – un harmonieux mélange d’amis du couple, d’amis politiques et d’amis d’Hollywood ; le lieu retenu pour la cérémonie – le domaine d’Astor Courts, construit, dit-on, sur le modèle du Petit Trianon de Versailles ; le menu du dîner de répétition et le gâteau à 5 étages à $9.000 – sans oublier les photos de la robe de mariée, signée de la créatrice de mode Vera Wang, en une dans le NYT du lendemain. Sans oublier la cérémonie elle-même, curieux mélange oecuménique très tolérant et somme toute très américain: le marié étant juif et la mariée protestante, ils auront eu droit à une double bénédiction, celle du rabbin et celle du pasteur, le marié ayant revêtu pour l'occasion la traditionnelle kippa et son châle de prières.

le mariage de Chelsea

Toutes les heures, l’Amérique toute entière a eu le droit à des flashs spéciaux sur le déroulement de ce week-end qui aura mobilisé plus de journalistes, de policiers ou de gardes corps privés que d’invités. C’est  que ce mariage n’était évidemment pas comme les autres.

Certes, les Américains ont l’habitude de suivre à la télé ou dans les magazines les unions de leurs stars préférées ou même des anciennes ‘First Daughters’ de la Maison Blanche, tel le très médiatique mariage de l’une des jumelles de W. Bush en 2008.

Mais le mariage de Chelsea a soulevé davantage d’émotion. Sans doute, l’Amérique s’est-elle souvenue de la jeune adolescente, autrefois décrite comme timide et maladroite, qu’elle a vu grandir sous ses yeux durant huit ans. Sans doute s’est-elle rappelée des moments difficiles traversés par la jeune femme à la fin de mandat de son père et de ses discours de campagne, talentueux et émouvants, prononcés huit ans plus tard pour soutenir la candidature à la présidence de sa mère en 2008. Assistant moi même à un meeting d'Hillary durant les primaires, j'avais été frappée par la belle allure et l'aisance de celle qu'on croyait "la fille de."

Sans doute encore, la curiosité a-t-elle été alimentée par le secret bien gardé, les interdictions de vols ou de circuler autour de la propriété abritant les noces (et les chiffres exorbitants circulant autour de la moindre dépense des futurs mariés pour une union qui aura coûtée au total plus de $3,8 millions !).

À cela s’ajoutent aussi une certaine nostalgie pour l’ancien président Bill Clinton, toujours très populaire dans les sondages, ainsi qu’un sentiment lui aussi, très américain : celui de la naissance de la seconde génération des Clinton et du début d’une nouvelle ‘dynastie’ comme n’hésitent pas à dire les médias aujourd’hui.

Ainsi va le paradoxe d’une démocratie américaine raillant les héritages royaux de la Vieille Europe et rêvant déjà d’une nouvelle saga Kennedy.