En Arizona...
Après trois mois de manifestations et d‘affrontements juridiques, la cour d’Arizona a invalidé une partie de la loi sur l’immigration qu’avait votée, en avril dernier, le congrès très républicain de ce même Etat et contre laquelle Barack Obama, via son Département de la Justice, s’était vigoureusement opposé.
En effet, c’est notamment la partie la plus controversée de cette loi, c’est-à-dire, l’autorisation donnée aux policiers arizoniens de contrôler, sans motif, toute personne dès lors qu’ils ont des "doutes raisonnables" pouvant laisser suspecter une entrée illégale sur le sol américain, qui a été invalidée par la juge Susan Bolton. Trois autres articles, relevant du même principe de durcissement de la lutte contre l’immigration clandestine, ont aussi été –provisoirement- annulés.
Ainsi, selon le rendu préliminaire de la Cour de justice d’Arizona sont supendus:
1/ l'article autorisant "un officier à contrôler, d’arrêter ou retenir tout individu pour déterminer son statut d’immigration, s’il existe un doute raisonnable sur la façon dont il est rentré aux Etats-Unis, et à demander une vérification de son statut avant de relâcher l’interpellé".
2/ l’article "instituant en délit le fait de ne pas avoir fait de demande de régulation"
3/ de même, l’article "instituant en délit le fait, pour un immigré clandestin, d’avoir demandé, candidaté ou exercé un travail" ;
4/ l’article "autorisant d’arrêter -sans mandat- tout individu pour lequel il y a raison de croire qu’il ait commis une infraction publique le rendant expulsable des Etats-Unis"
La juge a en effet retenu l’injonction déposée par le Département de la Justice le mois dernier, au motif que "la constitution et la loi fédérale américaine ne (saurait) permettre aux Etats et aux polices d’immigration locales d’ajouter leurs (propres) législations" ("the Constitution and federal law do not permit the development of a patchwork of state and local immigration policies throughout the country").
Les élus de la majorité ont tenu à répéter qu’il ne s’agissait là que d’une victoire provisoire, d’autant que la gouverneur de l’Arizona, Jan Brewer, a annoncé qu’elle allait faire appel de la décision. De plus, avec 11 millions de sans-papiers vivant illégalement sur le territoire américain, le problème de l’immigration est loin d’être réglé et les chances d’ouvrir – et de faire passer – une grande réforme nationale sur le sujet s’éloignent un peu plus à chacune des polémiques.
Reste, comme le faisait remarquer le NYT hier, que cette décision sonne comme un "avertissement pour tous les autres Etats américains qui envisageaient de suivre l’exemple de l’Arizona". Car au-delà de la bataille politique sur le caractère de criminalisation de l’immigration, contenue dans ce texte, le vote des Républicains d’Arizona avait aussi pu être perçu par certains comme une remise en cause de l’autorité de l’Etat fédéral – et de la Constitution.
Si cette décision est maintenue, ce sera donc une victoire pour l’administration Obama mais aussi pour les institutions, et les droits publics.
Je sais bien que la majorité des Américains interrogés (encore 66% en début de semaine) se déclarent en faveur du texte républicain et opposés à l’action présidentielle dans cette affaire. Ils sont donc sûrement fâchés de cette décision. Je sais bien que l'Amérique a encore plein de démons qui ne demandent qu'à sortir du placard. Il reste qu'un pays où il existe un contre-pouvoir qui peut défaire des initiatives sécuritaires et de discrimination scandaleuses, est une démocratie - imparfaite - mais vigilante, qui mérite d'être saluée.
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