Profitant d’un taux de popularité résolument à la hausse (avec un nouveau sondage le créditant à plus de 60% - son meilleur score depuis l’état de grâce post-élections), Barack Obama s’est envolé hier pour El Paso (Texas), décidé à s’attaquer de front à la question de l’immigration, un dossier toujours très sensible et polémique, en Amérique comme ailleurs.
Opération communication oblige, c’est dans un arrière-plan de miradors et de barbelés que le président a plaidé pour une réforme nationale de l’immigration – ou plutôt reparlé de son projet de réforme, car il n’est venu que répéter hier des mesures qu’il avait déjà présentées l’été dernier, en plein débat sur le durcissement des contrôles en Arizona.
Car au-delà des enjeux démographiques et migratoires, l’objectif de ce déplacement organisé à la dernière minute était d’abord fondamentalement politique. En effet, la mort de Ben Laden est devenu un prétexte parfait pour les Républicains, qui pressent l’administration Obama de renforcer les effectifs et contrôles aux frontières, agitant les menaces de représailles, et qui mettent la pression aux élus démocrates pour redéfinir la politique de sécurité nationale ou exigent un retrait anticipé en Afghanistan.
Ainsi BO s’est évertué, pendant près de 40 minutes, à renvoyer l’opposition à ses responsabilités, non sans une certaine ironie : "Voici le coeur du problème et je veux que vous prêtiez tous une oreille attentive à ce que je vais vous dire. Nous avons fait tout ce qui était demandé, et même plus, par les Républicains qui se disaient prêts à soutenir une remise à plat de la loi sur l’immigration, si on l’accompagnait d’un renfort aux frontières. Nous avons répondu à toutes leurs demandes (…) mais [maintenant], ils nous disent que nous devons tripler le nombre des gardes-frontières, [demain}, ils diront qu’il faudra le quadrupler. Ou ils diront qu'ils veulent une barrière plus élevée. Ou peut-être vont-ils réclamer des douves, voire même des alligators dans les douves (Rires) !
Ils ne seront jamais satisfaits. Et je comprends bien [ce qu’ils font]. C’est ca, faire de la politique."
("So, here’s the point. I want everybody to listen carefully to this. We have gone above and beyond what was requested by the very Republicans who said they supported broader reform as long as we got serious about enforcement. All the stuff they asked for, we’ve done. But (…) they said we needed to triple the Border Patrol. Or now they’re going to say we need to quadruple the Border Patrol. Or they’ll want a higher fence. Maybe they’ll need a moat. (Laughter.) Maybe they want alligators in the moat. (Laughter.) They’ll never be satisfied. And I understand that. That’s politics.")
Mais Barack Obama ne s’est pas arrêté aux manœuvres d’obstruction multipliées par les élus républicains depuis un an, il a aussi dénoncé les argumentaires aux relents de racisme utilisés par l’opposition qui profite du contexte économique difficile pour sordidement mêler la peur du chômage et de l’étranger : à cause de l’enlisement au Congres, "Regardez Intel, Google, Yahoo et eBay. [Regardez de plus près] ces grandes entreprises américaines, le nombre incalculable d'emplois qu’elles ont créées, le leadership qu’elles nous ont permis de prendre en matière de haute-technologie : chacune [de ces entreprises] a été fondée par un immigré".
Oui, il y a les actes et ceux qui les dénoncent. Il y a la volonté de gouverner pour le mieux de son pays et celle de marquer des points en détruisant toute initiative et en jouant de la surenchère. Oui, il y a bien "faire de la politique" et "avoir une politique". Rarement compatible. Obama en a fait hier la démonstration.
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