Pas mal de post ayant été échangés entre vous sur les Etats-Unis, l'Europe, et ce que chacun pense de la façon dont on s'y sent en tant qu' "expat", je vais vous répondre un peu, pas de façon trop personnelle, afin que chacun puisse en débattre (nous avons la chance d'avoir sur ce blog des Français, des Américains, des Européens, des Océaniens, des Africains, bref des connaisseurs de multiples cultures) et c'est intéressant de s' arrêter un peu sur ce qu'il y a, ici, d'attirant et de moins attirant.
J'ai vécu comme une chance de venir habiter quelques années ici. Je ne l'avais pas choisi, mais pour mon mari, ce job au FMI, c'est une opportunité extraordinaire de peser vraiment sur les problèmes du monde.
Et pour moi, vivre ailleurs qu'à Paris c'était une expérience nouvelle: ce n'était pas NY, mais pas le fin fond de l'Idaho non plus!
Parlons d'abord de Washington: je croyais la ville "provinciale", elle ne l'est pas du tout.
Les gens qu'on croise viennent de tous les pays du monde, c'est une ville très internationale, ouverte, étudianteet culturellement très vivante.
Les opéras, expos, musées, concerts, théâtres y sont nombreux et de grande qualité (j'ai vu il y a quelques jours une formidable pièce de Vaclav Havel très bien joué avec une excellent mise en scène, dans un tout petit théatre (The Source, 14th st, pour ceux qui connaissent) Il s'y trouve aussi le meilleur du meilleur chez les journalistes et politiques du pays, et cela ne me déplaît pas, bien sûr.
Cette année y est particulièrement fertile, grâce à l'élection américaine. Vous avez vu la rue danser de joie le 4 novembre. ça valait bien les soirs d'élections en France. Pour l'inauguration d'Obama en janvier, on attend des centaines de milliers de personnes, un million peut-être, venus du monde entier.
J'ajoute que la nature y est belle, riche, touffue, on est tout de suite en pleine forêt dont les tons (ça commence un peu à passer) y sont magnifiques à l'automne, dans les rouges vifs et les jaunes d'or.
Oui, le mois d'août sans clim y est insupportable et humide, mais, 1) il y a la clim partout et 2) nous avions la chance de ne pas être là. Sinon, le ciel est bleu la plupart du temps (il pleut cette semaine) comme rarement en Ile de France, et il n'a pas fait très froid l'hiver dernier pour mon premier hiver. Et je trouve la ville (pas NY, bien sûr, mais Washington) beaucoup moins polluée que Paris.
Parlons maintenant des Américains et de la vie quotidienne: les Américains sont gentils, accueillants, aimables. Bien sûr, moi aussi m'énervent les "wow", ; les "you are soooooo nice!"; les "I loooove your shoes, they are gorgeous! " de la part de la femme qui est dans la queue avec vous au guichet de la banque. On ne sait jamais la part de sincérité ou d'affectation.
Je m'y suis fait peu d'amis, quelques connaissances, toujours généreux et prêts à échanger.
Les Européens sont plus réservés, et les Français... nettement plus désagréables avec les étrangers! Ici, les gens viennent d'Afrique, d'Amérique du Sud, d'Asie, parlent souvent un anglais approximatif avec tous les accents possibles et sont très tolérants "if you have a little frenchie accent"...à la différence des Britanniques qui vous regardent de haut quand on écorche la sacro-sainte langue de Shakespeare!
La vie quotidienne est paradoxale. On est en Amérique, dans un pays technologiquement en pointe, ...et on a quelquefois l'impression d'être dans le Tiers Monde.
Certes, on peut faire ses courses au supermarché à 10h du soir, les pharmacies sont ouvertes 24h/24,les magasins sont ouverts le dimanche (ce qui ferait plaisir a sarko), mais les services publics sont pauvres, il vaut mieux y vivre bien portant et riche que pauvre et malade, l'école y est hors de prix, chacun sait tout cela. Evidemment, les gourmets diront qu'on y mange mal. Trop, oui, mal, pas toujours - là aussi quand on a les moyens: encore une fois, il y a a moins d'obèses a Washington que dans le Midwest car les revenus sont plus élevés et l'éducation meilleure! Sinon, la viande y est souvent délicieuse,beaucoup de cuisine étrangère, indienne, japonaise, chinoise, italienne, beaucoup de produits bios (les Américains polluent la planète, ne ratifient pas le protocole de Kyoto, mais sont fanas de tout ce qui est "organic", même le produit vaisselle!)
En revanche, le travail n'est pas très bien fait, contrairement à l'Europe. Il n'y a pas ou peu de formation professionnnelle obligatoire, les artisans se forment sur le tas, si bien que le plombier, s'il est bon, tout va bien, s'il est mauvais, tant pis pour vous. Le temps de travail limité dans presque toute l'Europe soit par la loi, soit par le contrat, (et qui fait hurler d'épouvante les Américains) n'empêche pas que la productivité m'y paraît bien meilleure qu'aux Etats-Unis où je trouve souvent le travail, bâclé, amateur. Et mon fameux plombier (qui n'est pas Joe le plombier, je vous rassure!!!) viendra sans rechigner, avec plein de bonne volonté, 10 fois de suite chez vous, une fois avec le mauvais tuyau, une autre avec un boulon trop gros, une troisième regarder et dire qu'il reviendra etc...
La presse est de qualité : New Yorker, NY times, Washington Post, il y a peu d'équivalents en France. Les journalistes y ont leurs défauts, mais ils travaillent, même à la télé où certains shows d'information ou de divertissement ( Colbert Show, Jon Stuart, Saturday Night Live) valent largement les nôtres. ( Je vous rassure, il y a aussi du vulgaire, du télé achat, de la série C ou D, mais "chez nous" aussi!!!). Et ils sont souvent critiques du pouvoir.
Alors bien sûr, comme tous les expats, on est loin de ses bases, de ses amis, de ses enfants. Mais j'ai la chance de venir souvent à Paris les voir - dès lundi d'ailleurs, c'est pourquoi je vous abreuve avant de partir d'une note si longue qu'elle est un roman :-))
Et puis la FNAC expédie les bouquins en quelques jours, les journaux français se lisent en PDF sur Internet, et j'avoue que je me passe assez bien de savoir le dernier fait divers, le dernier potin des audiences de TF1, la dernière querelle entre Rachida Dati et les magistrats, ou... les dernières agitations des partis politiques (sans citer de nom!).
Les Américains ne sont pas toujours soucieux des problèmes de la planète - on l'a déjà commenté ici - mais Washington, encore une fois, est suffisamment internationale pour qu'on soit au moins autant au courant de ce qui se passe dans le reste du monde - et croyez moi, il bouillonne le reste du monde, l'Afrique, l'Amérique du Sud, l'Asie - que dans les cafés de Saint-Germain des Prés où les préoccupations sont parfois bien étroites!
Donc pour résumer cette note à peine ébauchée (trop longue cependant, pardon aux lecteurs!!), et qui mériterait d'être bien affinée, (ce que je n'ai pas le temps de faire aujourd'hui), j'ai du plaisir - pour l'instant - à vivre ici, comme si je prenais un grand bol d'air frais. J'aurai envie de rentrer dans quelques temps, mais il me tarde, comme citoyenne, comme journaliste, de voir aussi la nouvelle Amérique d'Obama qui va peut-être changer beaucoup la perception que le reste du monde a des Etats-Unis.
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