Non, je ne suis pas en train de me lancer dans un commentaire du dernier match de foot de nos équipes nationales respectives, mais je veux parler ici de deux manifestations aux buts totalement opposés dans deux pays voisins et culturellement proches qui ont, toutes deux, eu lieu aujourd'hui.
Manifestation monstre en effet à Madrid aujourd'hui: une marée humaine a envahi les rues pour protester contre le projet d'extension de la liberté d'avorter, réservée jusqu'ici aux cas de viol, aux risques de malformation du foetus ou de danger pour la santé de la mère. L'objectif du gouvernement étant de calquer la législation espagnole sur celle de la plupart des pays européens. Des centaines de milliers de personnes, un million selon les organisateurs ont envahi les rues de Madrid. La manifestation avait été initiée par des organisations catholiques conservatrices très bien organisées, qui avait fait déjà descendre des centaines de milliers de manifestants dans la rue en 2005 pour protester contre la loi autorisant le mariage homosexuel.
A Paris, la manifestation était plus modeste. Pourtant quelques milliers de personnes sont descendues dans la rue pour réclamer une vraie égalité entre hommes et femmes : il faut savoir que le salaire des femmes, à niveau égal à celui des hommes leur est de 20% à 25% inférieur et que seuls 34% des cadres d'entreprise sont des femmes. Et à l'opposé de la situation espagnole, ils manifestaient aussi pour protester contre la fermeture de plusieurs centres d'IVG dans des hôpitaux publics...
Etonnante coïncidence des dates. Et apparent paradoxe: c'est au pays de Zapatero que les anti- avortement se déchaînent (et semblent faire basculer l'opinion publique qui semble compter désormais moins de soutiens au projet favorable à l'avortement que d'opposants). Et au pays de Sarkozy où les femmes réclament plus de liberté et d'égalité des droits. Sauf à en conclure que seuls les opposants manifestent, qu'est-ce que cela révèle de nos sociétés respectives? Intéressant d'y réfléchir...
En tous cas une chose me paraît assez évidente. Comme dans toutes les périodes historiques difficiles, au-delà des revendications économiques et sociales, le débat des années qui viennent aura lieu aussi sur les sujets de société et sur les valeurs: conservatrices pour certains, progressistes pour d'autres. Il n'est que de voir en France l'émotion, les débats et le bruit soulevés depuis quelques semaines sur les affaires Polanski, Mitterrand et Jean Sarkozy pour comprendre que ce qui se jouera, en tous cas chez nous, sera aussi une bataille sur la conception des uns et des autres de la société de demain.
La cacophonie européenne s'est encore illustrée ici et maintenant. Le PS espagnol devrait trouver en son sein une personnalité digne d'une Simone Veil pour rectifier le tir. Que doit en penser cette dernière, auteure de la loi française éponyme ?
Rédigé par : attila | 21 octobre 2009 à 11:38
oui c'est bien dit. C'est exactement comme aux Etats-Unis: les questions morales dechainent de plus en plus les opinions et divisent de plus en plus radicalement. Reste qu'il ne faut pas qu'elles prennent le dessus sur les autres questions politiques et qu'elles aveuglent les electeurs jusqu'a leur dicter leurs votes comme aux presidentielles americaines de 2004.
http://frketchup.blogspot.com
Rédigé par : Ketchup | 21 octobre 2009 à 06:39
Bonjour Anne. Le dernier paragraphe de ce post est tellement vrai. L'évolution sociétale et sa perception par chacun de nous, selon nos échelles de valeurs et les avancées qui nous seront proposées, ce sera "le sujet" politique de demain très vite. L'idée n'est pas nouvelle, mais jusqu'à ce jour, on a l'impression que nos dirigeants -de droite comme de gauche- se contentent de parer au plus pressé, en réagissant, en réfléchissant à un fait divers grave de société qui surgit. On regrette, on déplore et on oublie. On renvoie le traitement du problème et la recherche "rapide" de solutions adaptées aux calandes grecques. Cela vaudrait bien un ministère -le ministère de l'éthique- qui éviterait peut-être, entres autres choses, à une femme mariée devenue veuve de devoir avoir recours à une procédure pour devenir mère.
Rédigé par : topaz | 18 octobre 2009 à 14:50
N'est-ce pas en Espagne où les femmes vendent leurs ovocytes et cela ne trouble pas la population catholique plus intransigeante sur l'avortement ?
Cette population s'attaque à l'avortement classique qu'aujourd'hui, et c'est vrai que cette attitude ressemble étrangement à une remise en cause du droit des femmes à gérer leur corps.
Personnellement, je n'arrive pas à comprendre qu'en 2009,( plus de 30 ans après l'apparition de la pilule et d'autres moyens de contraception dont le préservatif), le nombre de grossesses non désirées reste élevé.
Il existe en outre maintenant la pilule du lendemain voire du surlendemain.
Alors que cache ce constat ?
On nous parle, en France, de fermeture de nombreux centres d'IVG, surtout à Paris. Connaît-on leur activité ? Le coût? Existe-t-il un regroupement ?
Avec la pilule du lendemain, l'IVG est-elle toujours autant pratiquée?
Quelqu'un a-t-il des chiffres, une remarque sur la situation en France ? Car si le nombre d'IVG ne faiblit pas, nous risquons de revenir aux faiseuses d'ange d'avant 1977.
Rédigé par : ghislaine | 18 octobre 2009 à 13:37
Perle datant des années 60 :o).. ce qui est plutôt récent en fait:
http://www.ouenja.fr/Nostalgie.htm
Rédigé par : Catherine | 18 octobre 2009 à 08:41
Absolument de cet avis, Anne.
La lutte entre deux choix de société sera vraisemblablement aussi importante que la lutte entre deux systèmes économiques.
Souvenons nous de la "réaction", aux États Unis, face à la théorie de l'évolution, même plus enseignée dans certaines écoles!
Il n'empêche que c'est Obama, le progressiste, qui a gagné.
Émancipation contre sujétion à des groupes de pression.Cet enjeu est aussi important que l'enjeu financier.
Rédigé par : Sélène | 18 octobre 2009 à 00:27
Bonsoir Anne, bonsoir à tous
Oui, manifestation impressionnante dans les rues de Madrid à l’appel des organisations catholiques contre le projet de loi légalisant l’avortement !
La loi en vigueur votée en 1985 ne dépénalise l'avortement que dans trois conditions : en cas de viol, avant la 12e semaine , en cas de malformation du fœtus, avant la 22e semaine, en cas de « risque pour la santé physique ou psychique de la mère » dans ce cas sans limite de temps.
C’est ce dernier cas qui est évoqué à 98 % et qui est analysé de manière très large par certaines cliniques privées de Barcelone notamment où nombre de femmes étrangères viennent y avorter au mépris des termes plus que restrictifs de la loi actuelle ! La loi soumise au Parlement aurait au moins le mérite de fixer un délai maximum de 14 semaines.
Il faut cependant en la matière noter la disparité en Espagne en ce qui concerne l’application de la loi en cours entre les communautés autonomes, qui portent bien leur nom.
En Navarre, siège de l’influente Opus Dei, qualifiée par certains Etats de secte, il est impossible pour une femme d’avorter, elle doit aller dans une autre région. Aucun avortement n’est pratiqué dans aucun hôpital public ou privé par conviction religieuse ou par crainte de représailles. Un médecin a été d’ailleurs été poursuivi en justice à de nombreuses reprises pour avoir pratiqué de avortements et y a renoncé.
Pour les hispanisants un article d’El Pais, oui je sais, je suis partisane !!
L’ancien chef de gouvernement José Maria Aznar présent à la manifestation car il s’agissait pour lui « d’un devoir de conscience et de citoyen » affirme que « nous sommes en train de transformer l’avortement en un droit » « toutes les limites sont dépassées »…
http://www.elpais.com/articulo/sociedad/Miles/personas/manifiestan/Madrid/Ley/aborto/elpepusoc/20091017elpepusoc_6/Tes
Rédigé par : Michèle Doige | 17 octobre 2009 à 23:49