Une remarque de Yul me fait réagir: "personne", dit-elle, "n'a parlé de la Libération de Paris"... Mais c'est bien sûr, elle a mille fois raison, l'Américaine, d'agiter notre mémoire oublieuse de Français ingrats.
Tous nos concitoyens connaissent, qu'ils l'aient vécue comme la génération de mes parents, ou qu'ils en aient vu cent fois les images comme la mienne ou celle de mes enfants, ces clichés émouvants des Champs Elysées en délire ovationnant De Gaulle et les membres du CNR qui descendaient à pied l'avenue emblématique. Il est vrai - pour qui se rappelle le remarquable film "le Chagrin et la Pitié" (qui fut interdit longtemps à la télévision et ne fut diffusé qu'après mai 81 - on croit rêver!!) - que des foules identiques applaudissaient quelques semaines plus tôt le Maréchal Pétain dans les rues de Vichy...
Cependant, l'histoire s'est écrite ce jour-là et je ne peux m'empêcher de frissonner quand j'entends ce discours inoubliable de de Gaulle "Paris, Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré !..."
La Libération... ça voulait dire quelque chose: la libération du joug de l'occupant nazi, la fin de l'humiliation, des privations, des crimes commis par la Gestapo, des déportations, bref de l'horreur que symbolisait le drapeau nazi qui flottait quelques heures plus tôt ce 24 aout 44 dans les arbres des Champs Elysées.
Et la remarque de Yul sonne d'autant plus juste que je regarde en ce moment les town halls (meetings) à la télévision étatsunienne et que je vois des excités, des abrutis, des ignorants, agiter des pancartes où est écrit le mot "nazi" sous les yeux des orateurs qui défendent le plan de réforme de santé d'Obama! On a le droit de discuter le financement, voire sans doute le bien fondé de cette réforme, mais comment des individus normalement constitués osent-t-ils traiter de nazi un homme d'Etat qui essaie d'apporter un peu de justice dans un pays qui la pratique si peu dans ce domaine tellement inégalitaire de l'accès aux soins?
Vous me direz, ma génération - et moi même - avons scandé "CRS-SS" en mai 68. Hé bien, aujourd'hui, quand je regarde le déchaînement de haine en ce moment aux USA contre ce Président qui bouscule les dogmes et les lobbies, et qui, j'espère, ira jusqu'au bout, rétrospectivement, je le regrette et j'en ai honte.
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